Sur le papier tout était parfait. Deux jours que nous étions en altitude, nous avions gravi un premier petit sommet, la Punta Giordani, pour s’acclimater et passé deux nuits à Mantova et Gnifetti où nous avions été chouchoutés par les gardiens. La météo était au top, la forme au rendez-vous (disons pas pire que d’habitude !).
Et pourtant. En arrivant proche de la rimaye du Lyskamm, aucun de nous ne le sent. Le trou est béant au milieu d’une pente super raide. Sur l’arête, la rimaye ne passe plus du tout. Certaines cordées passent bien dans face sud, mais je ne suis pas du tout inspirée.. D’abord je n’ose pas trop en parler, de peur de passer pour celle qui fait toujours échouer les projets. Mais il me semble que Pål n’est pas très emballé non plus. Je tente: « tu le sens comment, toi ? » et là il me répond « Je ne le sens pas du tout ! » La décision est prise, on fait demi-tour et on monte voir le levé du soleil à la Pyramide Vincent.
Aucune difficulté, juste le bonheur d’être en altitude en amoureux ! Nous ne regrettons pas la décision, le Lyskamm nous attendra. Nous sommes des privilégiés de vivre dans les Alpes et de pouvoir se payer le luxe de renoncer en se disant qu’on reviendra le week-end ou l’année suivante.
Nous ne devons pas perdre du vue pourquoi nous allons en montagne. Pour se balader dans des paysages magnifiques, partager des moments intenses, se dépasser, ressentir la nature et les éléments. Mais surement pas pour se faire peur et rentrer à la maison avec des ulcères gros comme des assiettes à soupe. Sur la route du retour, nous échafaudons les projets pour les jours à venir. L’envie et les idées sont toujours là !